Depuis la loi du 17 août 2015 relative à la transition écologique pour la croissance verte, tout immeuble équipé d’un chauffage collectif ou d’une centrale de froid doit comporter une installation permettant de déterminer la consommation de chauffage. Cette obligation n’est pas exigée lorsque l’installation est techniquement impossible ou qu’elle entraîne un coût excessif au regard des économies attendues, comme le dispose l’arrêté du 6 septembre 2019 qui est venu préciser l’article 71 de la loi ELAN qui modifie les obligations en matière d’individualisation des frais de chauffage.
Pour mémoire, l’individualisation des frais de chauffage (IFC) est un dispositif qui a fait ses preuves puisqu’il permet de faire des économies d’énergie substantielles en responsabilisant le consommateur. Nos voisins européens sont très largement en avance sur la France puisqu’ils ont déjà généralisé l’individualisation des frais de chauffage dans les immeubles collectifs munis d’un chauffage central, consécutivement à la directive 2012/27/UE qui rend obligatoire pour fin décembre 2016 la répartition des frais de chauffage pour tous les logements équipés de chauffage collectif. A titre d’information, plus de 30 millions de logements ont mis en place l’IFC en Europe avec des taux d’équipements des logements collectifs en comptage individuel de 99 % en Allemagne, 97 % en Autriche et 96 % en Belgique. De fait, nos concitoyens habitant dans les logements collectifs à chauffage centrale sont les seuls à ne pas pouvoir payer selon leur consommation réelle alors même que le poste de chauffage est le plus important des postes de charges.
Grâce à l’IFC chacun paye donc ce qu’il consomme réellement, amenant l’ensemble des occupants d’un immeuble à raisonner leur consommation d’énergie. Les Français sont quasi-unanimes sur le sujet. D’après un sondage OpinionWay paru en mars 2016, 93 % d’entre eux jugent cette mesure équitable. Toujours selon cette étude, 86 % des Français considèrent en effet que ce dispositif responsabilisera les consommateurs, allant même jusqu’à changer leur comportement.
La récente étude de l’ADEME portant sur l’IFC, la plus importante jamais réalisée en France, a eu le mérite de rassembler l’ensemble des parties prenantes, tout en servant de référence dans le cadre de la rédaction du décret et de l’arrêté conformément à ce que le ministre Julien Denormandie avait indiqué lors des débats autour de la loi ELAN : se baser sur l’étude ADEME pour définir le seuil de rentabilité de l’IFC et déployer ensuite largement le dispositif.
Cette étude relève que la mise en place de cette mesure permet en moyenne des économies de chauffage de 15% par an, soit 120€ net par an. Les répartiteurs de frais de chauffage sont fiables puisqu’il s’agit d’instruments de mesures répondant aux exigences du décret français sur les instruments de mesures ainsi qu’à la norme EN834 qui spécifie leurs exigences techniques et permet leur certification. Ce sont en outre les appareils les plus utilisés en Europe avec plus de 150 millions d’appareils installés.
L’étude ADEME rappelle également que la mise en place de l’IFC n’est « pas (un) facteur inhibiteur », mais apparaît davantage comme un facteur « plutôt neutre voire un outil de sensibilisation qui stimule les travaux (de rénovation énergétique). » Cette conclusion rejoint d’ailleurs les propos tenus par le Gouvernement à travers la voix du ministre Julien Denormandie, lequel qualifiait ce dispositif comme un « préalable à toute évolution comportementale » au moment des débats portant sur le sujet lors de l’examen du projet de loi ELAN. L’intérêt du comptage individuel étant qu’il permet à la fois d’obtenir des résultats très rapides en termes de retour sur investissement et de renforcer la rentabilité des travaux énergétiques.
La mise en place de mesures visant à réaliser des économies d’énergie comme l’individualisation des frais de chauffage, prend donc tout son sens au moment où l’impératif environnemental apparaît comme un sujet majeur dans le monde post-covid. Ceci est d’autant plus vrai que ce dispositif s’inscrit dans les ambitions portées à la fois par les Français, soucieux des enjeux environnementaux mais aussi de leur pouvoir d’achat, et des pouvoirs publics. Il s’agit enfin de la seule démarche qui intègre et valorise le paramètre comportemental des citoyens, dont personne ne niera l’importance ni les effets potentiels sur la consommation d’énergie par la responsabilisation individuelle.